Rencontre avec Adrien Mabire

Le cornettiste Adrien Mabire dirige l’ensemble la Guilde des Mercenaires, qui viendra vous présenter le programme Riposta.

Mais en fait, pourquoi « Riposta » ?

Je l’ai appelé Riposta car deux voix s’y affrontent. Dans cette période à cheval entre la grande Renaissance et l’époque baroque, c’est-à-dire à la fin du 16e siècle et au début du 17e, l’instrument phare de l’époque est le cornet, dont tous les traités prétendent qu’il est le plus à même d’imiter la voix humaine. De fait, il prend souvent la place de la deuxième soprano. C’est une époque où les instruments sont dépendants de la voix et de sa fonction, mais où la technique instrumentale évolue, permettant de faire apparaître quelques morceaux joués par des instruments. On prend la musique vocale qui existe, comme des madrigaux et des motets, pour faire des improvisations instrumentales sur l’une des voix en en conservant la structure harmonique et rythmique. Ce sont les débuts d’une nouvelle forme, qui s’appellera plus tard « sonate », ce qui signifie « qui sonne ».

Les œuvres du concert sont soit des pièces pour un instrument et une voix, soit des pièces pour deux voix où le cornet prend le rôle de la deuxième soprano. 

Avez-vous une œuvre ou un compositeur baroque préféré ?

Peut-être Les Vêpres de Monteverdi. C’est un agglomérat de différentes pièces qui montre le mélange parfait entre le chant grégorien et la nouvelle manière d’écrire et de jouer de la musique. Alliant l’instrumental, le vocal, le continuo, le chœur… c’est une œuvre complète sacrée qui se suffit à elle-même et montre l’étendue du talent à la fois musical et d’écriture de Monteverdi. C’est d’abord un homme de théâtre, qui travaille en premier lieu sur les émotions et les ressentis de l’âme humaine, qu’il allie à la parole divine.

Quel est ton plus beau souvenir de concert en tant qu’interprète ?

Lorsque j’ai joué Il Terremoto (le tremblement de terre), un opéra sacré d’Antonio Draghi, avec le Poème Harmonique dirigé par Vincent Dumestre à la Chapelle Royale de Versailles. C’est un petit opéra très léger, avec six personnages, où un texte en français interprété par la comédienne Alexandra Rübner avait été inséré. C’était un spectacle éclairé à la bougie, mis en scène par Benjamin Lazar [également présent cet été à Sinfonia avec L’Autre Monde ou les États et Empires de la lune, NDLR]. C’était une vraie expérience, j’ai eu l’impression de traverser un truc incroyable. J’avais marché plusieurs heures dans Paris la nuit après, je m’étais couché à 5 h du matin… Je ne sais pas si on l’a transmis au public, mais moi en tout cas, j’étais vraiment bouleversé.

Et en tant qu’auditeur ?

Je n’ai pas de souvenir aussi fort que ça. Je n’y étais pas vraiment spectateur, mais je pense quand même à un concert avec Philippe Jaroussky et Cecilia Bartoli, où la présence de beaucoup d’œuvres où je ne jouais pas me permettait d’assister au concert presque comme spectateur, c’était un beau souvenir.

Propos recueillis par Clémence Hérout.

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